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David Hockney, Portrait of an Artist, (Pool with Two Figures), 1972, Acrylique sur toile, 213,36 x 304,8 cm (84 x 120 ensemble),©David Hockney, Yageo Foundation Collection, Taiwan, Crédit photo : Art Gallery of New South Wales / Jenni Carter

Do remember, they can’t cancel the spring

Il y a des artistes qu’on admire, et d’autres qu’on aimerait emmener boire un thé à la menthe dans un jardin en fleurs. David Hockney est un peu les deux. Et c’est justement ce sentiment que l’on ressent en visitant David Hockney 25, la rétrospective monumentale présentée à la Fondation Louis Vuitton jusqu’au 31 août 2025.

Avec plus de 400 œuvres, l’exposition est à l’image de l’artiste : prolifique, joyeuse, éclatée, mais toujours maîtrisée. Elle couvre soixante-dix ans de création, tout en choisissant de s’ouvrir non pas sur ses débuts, mais sur ses vingt-cinq dernières années. Une inversion de perspective qui, on s’en doute, n’est pas un hasard : chez Hockney, le passé est un matériau de jeu, mais c’est le présent qui pulse.

Une vie à colorier (et à réinventer)

Peu d’artistes peuvent se vanter d’avoir été à la fois un pionnier du dessin sur iPad et un passionné du Quattrocento. Hockney, lui, a traversé les époques comme on traverse un paysage : avec curiosité, méthode et émerveillement.

Des piscines californiennes des années 60 (on pense bien sûr à A Bigger Splash) aux paysages de Normandie peints sur tablette en 2020, l’artiste a toujours su conjuguer technique et poésie. Et si certains peintres ont une « période bleue », lui semble avoir embrassé toutes les saisons, avec un net penchant pour le printemps.

Le parcours de l’exposition, très orchestré (Hockney a tout supervisé), débute donc avec ses œuvres les plus récentes. On y découvre des séries réalisées sur iPad, des portraits tendres de proches, des paysages de Normandie baignés de lumière et des bouquets de fleurs aussi complexes que des symphonies. Et, dans une salle plus intime, quelques œuvres encore jamais montrées, inspirées de Blake et Munch — autant dire qu’il y a de quoi flâner, rêver, et se perdre un peu.

Une fenêtre ouverte sur le monde

Ce qui frappe surtout, c’est cette manière qu’a Hockney de nous tendre la main à travers ses œuvres. Qu’il peigne un tronc d’arbre ou le visage d’un ami, il cherche à capter le vivant — pas le spectaculaire. Il peint vite pour « attraper quelque chose de vrai ». Il scanne, assemble, superpose, pour mieux restituer l’éphémère.

Dans ses paysages du Yorkshire ou de Normandie, on sent l’amour du motif répété, du détail qui frémit. Il y a toujours un arbre en train de bourgeonner quelque part, même quand tout semble figé. Même en 2020, en plein confinement, Hockney nous le rappelait : « They can’t cancel the spring ».

Le peintre, l’homme, l’œil

Au fil des salles, on découvre un Hockney multiple : inventeur de formes, chercheur d’images, et tendre observateur du monde. Un artiste qui a peint ses amis, ses chiens, ses jardins, ses amants, ses souvenirs, sans hiérarchie. L’un de ses autoportraits récents le montre dans une posture mélancolique, presque absurde, mais terriblement humaine.

Il y a aussi beaucoup d’humour dans son travail — ne serait-ce que dans les titres, ou dans sa façon de défier les conventions : des portraits numériques encadrés à l’ancienne, des perspectives inversées, des mises en scène domestiques dignes d’une scène de théâtre.

Une exposition comme un réveil sensoriel

On ressort de David Hockney 25 un peu comme après une balade dans la campagne au printemps : les joues rosies, le cœur léger, les yeux pleins de couleurs. On se dit que vieillir peut être une joie, que l’art peut être un terrain de jeu, et que dessiner une fleur sur iPad peut être aussi puissant qu’un grand tableau à l’huile.

Hockney ne nous propose pas un voyage nostalgique à travers sa carrière, mais un dialogue avec le présent, où chaque salle devient un jardin à explorer. Et dans un monde où tout s’accélère, il nous rappelle l’essentiel : regarder, vraiment, c’est déjà créer.

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