Les restaurateurs Anja Lindner-Michael et Thuja Seidel déballent les œuvres d’art à Berlin, septembre 2023, © Sabine Lata
La guerre bouleverse les vies humaines, mais elle met aussi en péril des trésors culturels d’une valeur inestimable. L’exposition « From Odesa to Berlin », présentée à la Gemäldegalerie de Berlin jusqu’au 26 juillet, met en lumière non seulement des chefs-d’œuvre de la peinture européenne, mais aussi les efforts héroïques pour protéger ces œuvres en période de crise.
Un acte de sauvegarde culturel
Dès les premières heures de l’agression russe en Ukraine en février 2022, une priorité s’est imposée auprès des responsables du musée d’Odesa : mettre en sûreté les œuvres les plus précieuses. Les 74 peintures, dont certaines signées par des figures majeures comme Frans Hals ou Roelant Savery, ont été transportées vers un lieu de stockage d’urgence en Ukraine. Ce transfert, réalisé dans des conditions difficiles, est un témoignage poignant de la détermination à préserver l’identité culturelle ukrainienne.
La coopération internationale : un pont entre Berlin et Odesa
Le projet d’exposition reflète une solidarité culturelle exemplaire entre l’Ukraine et l’Allemagne. La collaboration entre le musée d’Odesa, la Gemäldegalerie et la Alte Nationalgalerie a permis non seulement de réaliser cette exposition, mais également d’assurer la restauration et la mise en valeur des œuvres. Par exemple, de nombreux tableaux, arrivés à Berlin sans cadres, ont reçu des encadrements sur mesure, fruit du savoir-faire des conservateurs allemands.

Domenico Morelli, Portrait d'Olena Tolstoï, 1875, huile sur toile, 110 x 85 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-111, Gemäldegalerie, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Frits Thaulow, The Brook, 1875/1906, huile sur toile, 65,2 x 81,4 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-122, Galerie de peintures, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Gabriel von Max, Light !, début des années 1870, huile sur toile, 95,6 x 80,5 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-94, Gemäldegalerie, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Giovanni Battista Salvi, gen. Sassoferrato, Tête de la Vierge, 2e quart du XVIIe siècle/1685, huile sur toile, env. 43 x 33 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-178, Gemäldegalerie, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Giovanni Ghisolfi (?), Paysage, 2e moitié du XVIIe siècle, Huile sur toile, 71,2 x 77,3 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-30, Galerie de peinture, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Giuseppe Antonio Pianca, Saint Jérôme, après 1774 (?), huile sur toile, 99,5 x 74 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-31, Gemäldegalerie, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

Roelant Savery, Paradise, 1618/1628, huile sur bois, 22 x 34,9 cm, Musée d'art occidental et oriental d'Odesa, inv. no. ЗЖ-38, Galerie de peinture, Staatliche Museen zu Berlin / Propriété du Musée d'art occidental et oriental Odesa / Christoph Schmidt

D'Odesa à Berlin. Peinture européenne du XVIe au 19e siècle. Siècle, vue de l'exposition, galerie de peintures 2024, © Staatliche Museen zu Berlin / David von Becker

D'Odesa à Berlin. Peinture européenne du XVIe au 19e siècle. Siècle, vue de l'exposition, galerie de peintures 2024, © Staatliche Museen zu Berlin / David von Becker
Une résistance culturelle contre l’oubli
Au-delà des œuvres elles-mêmes, cette initiative raconte une histoire plus vaste : celle de la résilience culturelle face à la guerre. L’exposition souligne que le patrimoine ukrainien fait partie intégrante de l’histoire culturelle européenne. Les musées ne sont pas de simples dépôts d’œuvres, mais des gardiens d’identités collectives. En préservant ces peintures, c’est aussi l’âme d’un peuple que l’on protège.
Un message de solidarité
L’entrée gratuite pour les Ukrainiens, la présence de textes explicatifs en ukrainien et la mention de noms selon leur orthographe locale (« Odesa » et non « Odessa ») révèlent une volonté forte de reconnaissance et de soutien. Cet hommage appuie un message clair : l’art transcende les frontières et unit les peuples.
Le rôle des musées en temps de guerre
Cette exposition invite à réfléchir sur la mission des musées en période de conflit. Alors que des sites historiques et des collections artistiques restent menacés, le partenariat entre institutions européennes démontre comment une réponse coordonnée peut contribuer à préserver l’héritage mondial. L’initiative berlinoise rappelle que la culture est une arme de résistance pacifique, un élément fondamental pour construire l’après-conflit.
En déambulant parmi ces tableaux, les visiteurs ne découvrent pas seulement des œuvres d’art, mais aussi des histoires de courage, de coopération et de foi en l’humanité. C’est un rappel que l’art, même en temps de guerre, reste un pont entre les peuples et un témoin de la persistance de la beauté dans l’adversité.
À découvrir
“Promesses” : Le futur de l’art s’expose
Art Paris 2025
Le désert au croisement de l’art et de la science
Une exploration sensible à la Grande Galerie de l’Évolution
Le Vietnam à travers l’objectif d’un témoin
Marc Riboud : Photographies du Vietnam 1966-1976